LE COIN D'ANNICK BOULEAU : FILMOGRAPHIE

observer, deviner, pratiquer

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été tardif

miniDV couleurs, 21' 41, 2012.
réalisation, image et son : Annick Bouleau
Production : Ansedonia (c)


Pour faire un lien vers ce film :
http://www.ouvrirlecinema.org/pages/mon-coin/ab/filmo/etetardif.html



clic sur l'image pour accéder au film

Ce dimanche 9 septembre 2012, à Paris, il faisait excessivement chaud. Splendidement beau et chaud. Le fils d'une amie joue dans un big band au kiosque du jardin du Luxembourg. J'y vais. J'emporte ma caméra. On verra bien…

Connaissant le lieu, étant donné la splendeur lumineuse de l'instant, je savais que j'allais me poster loin du kiosque, au milieu des arbres et des promeneurs. La suite, je le découvrirais au fur et à mesure que le plan sera enregistré, que mon corps se déplacera, les yeux rivés à l'écran. Je découvrirai en même temps que la caméra.

Un plan séquence de presque 22 minutes. J'ai simplement « coupé » quelques « images » au début et à la fin (un passant trop voyant, le tremblé de fin de plan). Tous les mouvements, attentes, déplacements ont été décidés dans l'instant.

Satisfaire la « pulsion ». Filmer

Freud dit qu'une pulsion est une poussée, une force, qui vient de l'intérieur et auquel on ne peut échapper. Que le but d'une pulsion est toujours la satisfaction, « qui ne peut être obtenu qu'en supprimant l'état d'excitation à la source de la pulsion ». Filmer est sans nul doute un moyen pour satisfaire la pulsion scopique. Les petites caméras numériques (comme la Paluche, en son temps) sont de merveilleux objets de la pulsion scopique.

J'ai appris à filmer avec la Paluche. Je retrouve un plaisir proche avec les petites caméras numériques. J'aime cette solitude totale face à ce qui arrive, à ce qui m'arrive (inutile de chercher de l'aide en cas de panne ou d'accident quelconque. Pas d'autre de l'Autre, comme dit Lacan ?).

Au moment d'appuyer sur ON, j'ai oublié tout ce que je sais. J'entre dans un nouvel univers. Pourtant ce que je sais (ce que j'ai lu, ce que j'ai appris), est inscrit en moi et même je crois que certains éléments font partie désormais de mon ADN. Serais-je devenu un OGM ???

Parmi ces éléments :

À peine ai-je écrit ces lignes que je m'empresse d'appeler à la rescousse une amie afin de vérifier la question des majuscules dans la formule lacanienne. Et voici ce qu'elle m'écrit : « Mais non : il n'y a pas d'autre (petit autre) qui soit l'Autre (le grand). Pas plus qu'il n'y aurait d'Autre (de grand) pour l'autre (le petit).
Ben oui : comme ça on est bien tout seul, enfin tranquille !
Et libre de ne parler qu'à notre propre "grand Autre" : évidemment ça dérape, comme s'il était "commun" à tous...!
Il est le trésor des signifiants, comme dit Lacan, non ? »

Alors : tout seul, enfin tranquille ? Bon, bon, c'est vite dit… Bonjour l'angoisse…

La règle, la loi

À un ami producteur de cinéma, auquel je transmets le lien de cette page, j'écris :
Tu dois oublier ton métier. Imaginer et accepter qu'il y a d'autres façons de faire usage de la lumière et d'un support qui bouge et qui est impressionné.


Je travaille (questionne) le geste cinématographique, ce qui est à la base de tout plan de cinéma. Sauf que cela est en général recouvert par des tas d'autres choses (le scénario, le jeu des acteurs, les effets de toutes sortes, le montage, etc…)

Moi, j'épure, j'épure, pour ne retenir, à chaque fois, qu'une ou deux choses d'essentiel. Bien sûr, quand je filme, je ne pense pas comme ça. C'est, comme on dit — même si je n'aime pas ce terme — instinctif. Pourquoi ? Parce que j'ai beaucoup beaucoup travaillé avant. C'est comme si le corps et la caméra se mettaient à travailler tout seuls à partir d'un seul ordre que je leur ai donné au début et qu'il est — soi-disant — interdit de transgresser (enfin, ce n'est plus tout à fait vrai à 100 %. Avec le temps, la pratique, j'arrive à vivre un peu plus facilement qu'au début, sur deux registres, à penser et à filmer en même temps, sans que l'un tue l'autre)

Je peux donc tout me permettre (oser me permettre), les règles habituelles ne sont plus les miennes. Je travaille avant la règle mais je prends en considération la transgression, l'interdit, ce qui est une tout autre affaire, beaucoup plus fondamentale, primordiale, primitive : la loi ? quelle loi ?

Variations sur la désynchronisation

Je ne me souviens plus quand j'ai décidé de filmer en tournant autour du kiosque à musique. Je pense que c'est dans la première minute, en plan fixe, avant de me mettre en marche.

Ensuite, pour rythmer mon allure, j'ai découvert deux repères : un repère sonore : la musique ; un repère visuel : l'arrivée, improbable, dans le cadre de l'écran-caméra, selon différentes échelles de plans, des cheveux, chapeaux, cous, sacs, dos, corsages, bras, chemises, peaux, des spectateurs assis et au milieu desquels je me glissais.

Et j'avais décidé aussi, entretemps, de différer mon approche des musiciens, d'y arriver en plusieurs 'tours', avec, à chaque cercle accompli, un décrochage. Sachant que je ferais la même chose, mais en sens inverse, pour quitter les musiciens et clore, qui sait comment, le film.

Mais je me suis retrouvée à éprouver un autre type de décrochage : quand la musique s'est arrêtée. J'ai ressenti un vide, je perdais un guide, un repère. C'est comme si je poursuivais mon mouvement circulaire dans le noir, comme si j'aurais dû, même si cela n'a aucun sens quand on y réfléchit, m'arrêter, en synchronie avec la musique. Absurde, et pourtant je l'ai ressenti. Je retrouve ce même trou, ce même vide, quand je visionne à présent été tardif, quand je deviens spectatrice.

Comme si l'arrêt de la musique provoquait une désynchronisation de toute la bande son ! Un certain mouvement poursuit son chemin alors qu'un autre a fait une pause, s'arrête en route ! On retrouvera quelque chose de similaire à la fin du plan-film mais selon une autre couleur.

C'est pour de telles surprises que j'aime filmer, faire du cinéma !

Ce qui m'a manqué malgré tout pendant ces 22 minutes c'est l'écoute-casque, la caméra ne possède pas de prise adéquate, pour écouter ce que l'appareil capte et enregistre et non ce que mon oreille interprète : c'est en regardant le film ensuite que j'ai découvert la marquetterie de tous ces bruits : voix apparaissant disparaissant, bruits des pas sur la terre sèche, ….

à venir :

répétition, reprise/récurrence/algorithme

sentir/percevoir

(En cours d'écriture. 18 septembre 2012)

 

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