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Sigmund Freud, Inhibition, symptôme et angoisse, 1926, Puf, 1993, p. 3-5, Œuvres complètes ou coll. Quadrige.
Accès à la V.O.


Notre usage de la langue nous amène à différencier, dans la description de phénomènes pathologiques, des symptômes et des inhibitions, mais il n'attribue pas beaucoup de valeur à cette différence. Si ne se présentaient pas à nous des cas de maladie dont il nous faut bien dire qu'ils montrent seulement des inhibitions et pas de symptômes, et si nous ne voulions pas savoir quelle est la condition pour cela, nous aurions à peine intérêt à délimiter l'un par rapport à l'autre les concepts d'inhibition et de symptôme.

Ces deux concepts n'ont pas poussé sur le même terrain.
Inhibition a une relation particulière avec la fonction et ne signifie pas nécessairement quelque chose de pathologique, on peut aussi nommer une restriction normale d'une fonction : inhibition de celle-ci. Symptôme au contraire ne veut rien dire d'autre qu'indice d'un processus morbide. Une inhibition peut donc être aussi un symptôme. L'usage de la langue procède donc de telle sorte qu'il parle d'inhibition là où on est en présence d'un simple abaissement de la fonction, de symptôme là où il s'agit d'une modification inhabituelle de celle-ci ou d'une nouvelle opération. Dans bien des cas, il semble laissé à l'arbitraire de décider si l'on veut mettre l'accent sur le côté positif ou sur le côté négatif du processus pathologique, désigner son succès comme symptôme ou comme inhibition. Tout cela n'est vraiment pas intéressant et la façon de poser la question, qui fut notre point de départ s'avère peu féconde.

L'inhibition étant, du point de vue conceptuel, si intimement rattachée à la fonction, on peut avoir l'idée d'examiner les diverses fonctions du moi en vue d'observer sous quelles formes leur perturbation se manifeste dans chacune des affections névrotiques. Nous choisissons pour cette étude comparative : la fonction sexuelle, l'alimentation, la locomotion et le travail professionnel. […] Nous pourrions étendre cette vue d'ensemble à d'autres fonctions, mais nous ne saurions nous attendre par là à obtenir davantage. Nous n'irions pas au-delà de la surface des manifestations. Décidons-nous pour cette raison en faveur d'une conception qui ne laisse plus grand-chose d'énigmatique au concept d'inhibition. L'inhibition est l'expression d'une restriction fonctionnelle du moi qui peut elle-même avoir des causes très diverses.


Giorgio Agamben, « Introduction », in Walter Benjamin, Baudelaire, éditions La Fabrique, 2013. [Ouvrez !]

« Benjamin distingue dans son travail la phase de la documentation et celle de la construction. Espagne et Werner, qui ont attiré l'attention sur cette distinction, ont raison d'observer qu'elle ne doit pas être entendue comme une “division chronologique entre deux phases de travail”, mais comme “une distinction systématique entre deux manières de travailler fondamentalement différentes qui, du point de vue chronologique, avancent de manière parallèle”. Et de fait, Benjamin possédait parfaitement la distinction proposée par Marx entre “mode de la recherche” (Forschungsweise) et “mode de l'exposition” (Darstellungsweise). Il la cite expressément dans la section N des Passagen : “La recherche doit s'approprier des matériaux dans les détails, elle doit analyser les différentes formes de son développement (Entwicklungsformen) et en retracer l'articulation intérieure (inneres Band). Ce n'est qu'une fois que ce travail a été mené à bien que le mouvement réel peut être exposé de manière convenable. Si cela marche, si la vie du matériel (das Leben des Stoffs) se présente de manière idéalement réfléchie, on peut croire alors qu'on a affaire à une construction a priori” » (p. 13-14).

« Cela permet [en outre] de mettre en perspective ce “montage littéraire” que Benjamin a pu identifier comme la méthode la plus propre à son travail […]. Il ne s'agit pas tant, comme a pu le penser Adorno, de “ne laisser apparaître les significations qu'à travers un montage choquant (schokhafte Montage) des matériaux”, ou d'écrire une œuvre qui ne serait “faite tout entière que de citations” : il s'agit, en mettant la dispositio au centre du processus de la composition, de permettre aux formes de développement et au lien interne contenus dans les matériaux philologiques, de conduire à la rédaction par la seule force de leur construction. » (p. 16).

Walter Benjamin, cité par Giorgio Agamben, « Introduction », in Walter Benjamin, Baudelaire, éditions La Fabrique, 2013. Réponse à Theodor W. Adorno lui reprochant « d'avoir omis la médiation par la théorie et d'être resté ainsi empêtré dans une “exposition étonnée de la pure factualité” »

« Je pense que la spéculation ne prend son vol, et un vol nécessairement audacieux vers une certaine réussite, que si, au lieu de mettre les ailes de cire de l'ésotérique, elle cherche dans la construction seule sa source d'énergie. La construction voulait que la seconde partie du livre soit faite essentiellement d'un matériau philologique. Il s'agit là moins d'une “discipline ascétique” que de dispositions méthodologiques. […]
Lorsque vous parlez d'une “présentation étonnée de la factualité”, vous caractérisez l'attitude philologique dans sa vérité. Il fallait l'insérer dans la construction, non seulement pour les résultats qu'elle donne, mais justement pour ce qu'elle est. […] L'apparence de factualité close sur elle-même, qui s'attache à l'étude philologique et qui envoûte le chercheur, disparaît dans l'exacte mesure où l'on construit l'objet dans la perspective historique. Les lignes de fuite de cette construction confluent à l'intérieur de notre propre expérience historique. L'objet se constitue ainsi comme monade. Dans la monade, tout ce qui, au terme de l'analyse du texte, s'établit dans une rigidité mythique, prend vie. » (p. 17)

(Page créée il y a très longtemps, en l'état le 8 novembre 2024 et en devenir…)

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