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Cette fois-ci vont être associés des textes et une série
d'images
La structure diaphane du cloisonnement gothique, Hans Jantzen
« L’analyse de la
délimitation spatiale que j’expose dans
ce qui suit se rapporte à une manifestation (Erscheinung)
que je caractérise par le concept de structure
diaphane. Commençons par indiquer à grands
traits ce qu’il faut comprendre par là.
Structure diaphane ne signifie pas la même chose
que : création d’ouvertures, ou allégement
dans le cloisonnement de la nef principale. Même
l’art roman pratique très largement des
trouées dans la délimitation spatiale
du vaisseau central, mais il y a là un tout autre
caractère que dans la structure diaphane qui
caractérise le gothique. Ce qui, dans l’architecture
romane, demeure toujours déterminant, c’est
l’interprétation du cloisonnement comme
masse murale continue et largement déployée,
même lorsque l’on pratique le plus possible
de trouées, par exemple par l’ouverture
de larges arcades, la succession des arcs en plein cintre
assume la fonction de souligner
la continuité murale dans le rapport le plus étroit avec la “frontalité” (au
sens de l’expression : faire front), posée
en principe, de tous les éléments. La
continuité murale n’a pas besoin de se
déployer en surfaces nues (comme dans le cas
des édifices du XIe siècle) : elle peut
recevoir une animation par l’échelonnement
des arcades, des galeries et par les nervures (c’est-à-dire
ce qui apparaît en saillie au sommet des piliers.
Mot propre : dosserets). Mais toujours lorsque la cloison
romane de la nef est percée d’ouvertures,
l’articulation murale tient le langage d’une
alternance entre les éléments muraux fermés
et ouverts, c’est-à-dire que les ouvertures
reçoivent leur valeur d’articulation du
contraste avec les parties fermées, même
lorsque celles-ci se réduisent aux piliers, entendus
comme représentants de la continuité murale.
La structure diaphane du cloisonnement gothique
n’a rien à voir avec ces contrastes d’éléments
muraux fermés
et ouverts. Au contraire, le rapport
de la paroi, comme masse corporelle et plastique,
aux éléments
d’espace qui sont derrière elle parle comme
rapport entre masse corporelle et fond.
Cela veut dire : la paroi comme
délimitation du corps de
la nef dans son ensemble n’est pas concevable
sans ce fond
d’espace, et c’est de lui
qu’elle
reçoit son pouvoir de produire un effet, le fond
d’espace lui-même comme zone optique qui
est, pour ainsi dire, à l’arrière
de la cloison. Dans l’expression, “être à l’arrière
de”, ce qui s’exprime, c’est la relation
de la paroi matérielle au fond d’espace.
Ce que veut dire, ainsi, le concept de structure
diaphane, c’est que divers éléments
d’espace
qui se situent derrière la paroi murale (entendue
comme délimitation de la nef) interviennent fonctionnellement comme pure manifestation optique dans la
création
stylistique que devient le cloisonnement
de la nef. C’est seulement en direction de cette
possibilité qu’il
y a lieu d’utiliser les ouvertures. »
Hans Jantzen « Sur l'espace intérieur
de l'église gothique » (1927), in Jean Beaufret, Leçons
de philosophie, I, Introduction, libres
propos au sujet de “qu’est-ce
que la philosophie ?”, Seuil, Traces écrites,
1998, p. 20-21.
Jean Beaufret va poursuivre sa 'leçon' en donnant
trois exemples pour illustrer le concept
de 'cloisonnement diaphane' (passage de
Nevers à Laon par l'intermédiaire de Langres)
Cathédrale de Nevers
http://commons.wikimedia.org/wiki/File:Nevers_Cathedrale_Nef.jpg
Cathédrale St Mammès de Langres
http://fr.structurae.de/photos/index.cfm?JS=108426
Cathédrale de Laon
http://fr.trekearth.com/gallery/photo857757.htm
Essai sur l'histoire de la psychothérapie institutionnelle, Jean Ayme
« Mais certains considèrent
que seule compte désormais la prise en charge
des malades hors de l'hôpital, où ils les
ont généralement laissé croupir
dans une situation à peine modifiée depuis
la période asilaire. Ils ont alors beau jeu de
dénoncer l'hôpital comme lieu de chronicisation
que précisément leur passivité a
entretenu. L'hôpital devient un mauvais objet
en opposition à l'extra-hospitalier, lieu paradisiaque
où la schizophrénie se dissoudra par la
seule vertu d'un évitement de l'hospitalisation.
Si celle-ci est parfois consentie, c'est à regret,
témoignage d'un échec et comme une mauvaise
action. Cette naïveté 'écologique',
plus ou moins teintée d'anti-psychiatrie, réalise
une véritable fuite en avant dans laquelle vont
s'engouffrer ceux qui étaient restés inactifs
dans l'hôpital où ils se contentaient de
distribuer des médicaments. Voilà un exemple
de ce que j'appelle les faux problèmes. Au lieu
de s'apercevoir que le fait qu'une même équipe
s'occupe des malades tout au long de leur
trajectoire thérapeutique induit une nouvelle dialectique
du dedans et du dehors, ils s'en tiennent à une
position manichéenne, la Société devenant
une bonne mère et l'hôpital un lieu maudit.
Certains pensent même qu'ils peuvent se passer
totalement de l'hospitalisation plein-temps
(ils laissent bien entendu cette charge
aux collègues
du secteur voisin) rejoignant ceux qui veulent
'brûler
les hôpitaux psychiatriques' et préconisent
le modèle italien. J'ai proposé, pour
tenter de sortir de cette fausse opposition,
de prendre, pour imager le secteur, le modèle
topologique de la bande de Moebius caractérisée
par le fait qu'on peut passer d'une face à l'autre
sans franchir de bord,
mettant en évidence
ce qui constitue l'essence du secteur, la continuité.
Pour en finir avec les faux problèmes, je rappellerai
la prétendue opposition entre politique de secteur
et psychothérapie institutionnelle, celle-ci
laissant la place à la première en s'appuyant
sur une approche historique simplette. Si
elle a pris naissance dans l'hôpital, c'est parce
qu'il n'y avait à l'époque pas d'autre
lieu d'accueil de la psychose. L'hôpital doit être
considéré,
comme le rappelait récemment Hélène
Chaigneau, comme le laboratoire où s'est élaborée
cette nouvelle praxis liant le sociologique
et le psychanalytique. Ceux qui ont pu,
lors de leur fuite en avant vers les verts
pâturages
de l'extra-hospitalier, avoir l'illusion
qu'il n'y aurait plus désormais
de facteurs d'aliénation, ont bien dû convenir
qu'un hôpital de jour ou un appartement thérapeutique
n'échappait pas aux risques de chronicisation,
et que dans une structure, aussi 'intermédiaire'
soit-elle, on ne pouvait méconnaître sans
risque l'élément axial de toute visée
thérapeutique pour l'individu comme pour le groupe,
le conflit.»
Jean Ayme, « Essai sur l’histoire
de la psychothérapie
institutionnelle »
http://balat.fr/spip.php?article82
Anatomie comparée (oignon et coupe de tête humaine, Léonard de vinci + Jean DUBUFFET
« Si tu fends un
oignon en son milieu, tu pourras voir
et compter toutes
les tuniques ou pelures qui forment des cercles concentriques
autour de lui.
De même, si tu sectionnes une tête humaine
par le milieu, tu fendras d’abord la chevelure,
puis l’épiderme, la chair musculaire et
le péricrâne, avec, au-dedans, la dure-mère,
la pie-mère et le cerveau, enfin de nouveau la
pie-mère et la dure-mère, et la rete
mirabile ainsi que l’os qui leur sert de base. »
Quaderni V 6 v.
Léonard de Vinci, Carnets,
tome 1, Gallimard, Tel, p. 203-204.
Ce petit texte est cité par
Georges Didi-Huberman dans son livre Être
crâne, (p. 19).
Dans une note au bas
de la même page, GDH renvoie à quelques
lignes de Jean Dubuffet (Lettre à Gaston Chaissac,
28 août 1950) :
« […] et une fois que j'ai voulu
peler un oignon j'ai enlevé la première
enveloppe puis la suivante et ainsi de suite
jusqu'à ce
que je me sois aperçu que j'allais enlever tout
et qu'il n'y aurait plus d'oignon puisque
un oignon n'est fait […] que d'enveloppes
successives qui n'enveloppent à la fin rien
du tout.Ça n'empêche qu'un oignon c'est
quelque chose qui existe. Mais de l'éplucher ça
n'avance à rien. »
Deux façons d'envisager le geste d'ouvrir…
Ces deux citations
sont aussi une incitation à lire les interprétations
de Georges Didi-Huberman…
L'image ouverte, Georges Didi-Huberman
« Les images s’ouvrent et
se ferment comme nos corps qui les regardent.
Comme nos paupières quand
elles clignent pour mieux voir, ici
ou là, ce que l’image
recèle encore de surprises. Comme nos lèvres quand
elles cherchent leurs mots pour offrir
une parole à ce regard,
fût-il interloqué. Comme notre respiration, imperceptiblement
suspendue, voire haletante, devant
une image qui nous émeut.
Comme notre cœur qui bat un peu plus vite à la mesure
de l’émotion, dans son rythme de diastole qui ouvre
et de systole qui ferme, de diastole
qui rouvre et de systole qui referme,
et ainsi de suite.
Cela, bien sûr, va s’entendre métaphoriquement.
Nous sommes devant les images comme
devant d’étranges
choses qui s’ouvrent et se ferment alternativement à nos
sens — que
l’on entende dans ce dernier mot un fait de sensation ou un
fait de signification, le résultat d’un acte sensible
ou celui d’une faculté intelligible. Ici, nous avons
cru avoir affaire à une image familière, mais voilà que,
tout à coup, elle se referme devant nous et devient l’inaccessible
par excellence. Là, autre version de cette même inquiétante étrangeté —,
nous avons éprouvé l’image comme un obstacle
insurmontable, une opacité sans fond, quand, soudain, elle
s’ouvre devant nous et nous donne l’impression qu’elle
nous aspire violemment dans ses tréfonds. Les images nous
embrassent : elles s’ouvrent à nous et se referment
sur nous dans la mesure où elles suscitent en nous quelque
chose que l’on pourrait nommer une expérience intérieure. »
[…] (p. 25)
« Or, il faudrait savoir parler de l’image
ouverte autrement
que par métaphore, idée abstraite ou simple thème
iconographique. » […] (p. 27)
« Dire que les images s’ouvrent et se ferment comme
nos corps qui les regardent, c’est dire que les images sont
créées
par nous à notre image : non pas seulement à l’image
de nos aspects, mais à celle de nos actes, de nos crises,
de nos propres gestes d’ouverture. Si l’image et l’imitation
ont partie liée, cela suppose que l’imitation elle-même
ne se réduit en rien au critère de valeur à quoi
l’a confiné, depuis Winckelmann, toute une tradition
esthétique. Cela suppose que l’imitation, comme l’image
qui en résulte, procède d’un paradigme essentiellement
anthropologique et que la notion d’anthropomorphisme étend,
quant à elle, ses pouvoirs bien au-delà de ce qu’on
nomme couramment les arts figuratifs.
» […] (p. 30)
Image et ouverture, chair et inconscient
sont indissociables comme la matière elle-même est
indissociable des intervalles qui
la font, justement, tenir ou consister.
L’ouverture est dans
l’image un fait de structure, un
portant, un principe d’animation — ce que j’ai
nommé un motif — et non un simple thème à traiter
iconographiquement ou typologiquement.
Mais il leur faut affronter ce paradoxe
: l’ouverture n’est
pas seulement un état
de fait ou un “dispositif”, comme on dit. C’est
un acte, un processus d’altération. C’est
donc un fait de structure qui porte
atteinte à la structure
(voilà,
d’ailleurs, exactement ce que pourrait être une définition
opératoire, critique et non clinique, du symptôme).
En ce sens, je n’ai pas voulu parler de l’image
ouverte dans les termes
où Umberto Eco avait parlé, selon
le point de vue structuraliste, d’une œuvre ouverte.
Eco parlait de l’informe ou de l’informel, par exemple,
au seul regard d’une “théorie de l’information”.
Il faisait de l’ouverture un pur principe de réception — une “condition
de la jouissance esthétique”, disait-il — fondé sur
la nature “fondamentalement ambiguë” du “message” délivré dans
une œuvre d’art. » […] (p. 32-33)
« L’image ouverte est, à sa façon,
l’image
toujours survivante du motif, immémorial et immédiat,
de l’ouverture. Façon de dire que, dans l’image,
les problèmes de spatialité — puisque, aussi
bien, ouvrir nous dit d’abord une certaine opération
sur l’espace — sont inséparables des problèmes
de temporalité.
On ne peut comprendre tous ces motifs
entrelacés qu’à impliquer la dimension anthropologique
des images dans un point
de vue métapsychologique capable
de ne pas séparer l’image comme objet et l’image
comme opération du sujet. […] On ne désintrique
pas l’objet visuel (cette chose concrète de bois, de
toile et de pigments, accrochée au mur d’un musée,
par exemple) du sujet des regards (celui du peintre, du commanditaire,
des amateurs qui se sont succédé devant
l’œuvre,
de nous-mêmes aujourd’hui). On ne désintrique
pas l’image de l’imagination et celle-ci de l’économie
psychique où elle intervient. »[…] (p.
34)
« L’expression d’image
ouverte vise donc
une économie très particulière de l’image — la plupart
des images qui nous environnent ne
nous proposant qu’écrans,
bouche-trous, sutures par le semblant — où formes,
aspects, ressemblances se déchirent et laissent apparaître,
tout à coup, une dissemblance fondamentale. C’est alors
que, selon la profonde remarque de
Lacan dans son commentaire sur le “Rêve de l’injection
d’Irma”, le “rapport
imaginaire atteint lui-même sa propre limite” non pas
du côté de la symbolisation mais bien du côté d’une
réelle altérité, le “dissemblable essentiel,
qui n’est ni le supplément ni le complément
du semblable, [mais] qui est l’image même de la dislocation.” L’image
ouverte désignerait donc moins une certaine catégorie
d’images qu’un moment privilégié, un événement
d’image où se déchire profondément, au
contact d’un réel, l’organisation aspectuelle
du semblable. » […] (p. 35)
« Sans doute faudrait-il finir par repenser
les rapports de l’image au mot, de la chair au verbe, en se
réglant, non seulement sur une sémiologie des mots
prononcés, mais sur une phénoménologie des
bouches— réelles ou imaginaires — qui sont supposées
les prononcer, les murmurer ou les
crier, fût-ce tacitement
: histoire de mieux comprendre les
rapports fondamentaux que l’image
entretient avec l’incarnation et l’incorporation. » […]
(p. 53-54)
Georges Didi-Huberman,
L’image ouverte. Motifs de l’incarnation dans les arts
visuels, Gallimard, 2007.
Pour tenter d'éviter les risques de malentendus sur des
termes comme réel, imaginaire, symbolique, un travail prémiminaire
s'impose :
http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9el_symbolique_imaginaire
http://fr.wikipedia.org/wiki/Discussion:R%C3%A9el_symbolique_imaginaire
http://www.freud-lacan.com/articles/article.php?url_article=hfrignet120305
http://www.causefreudienne.net/etudier/essential/imaginaire-symbolique-et-reel.html?symfony=a2e2b73d288e30bce149f5e0e9ed27db
Il s'agit, semble-t-il, d'un geste 'reconstitué', Lucio Fontana
ne souhaitant pas être photographié en acte.
Pour une approche du travail de Lucio Fontana :
http://www.fondazioneluciofontana.it/galleria.html
Taglio,
en italien, c'est une entaille, un geste.
Une césarienne
se dit taglio cesareo.
Les photos sont de Ugo Mulas. On les retrouve
sur de nombreuses pages du Net.
Mais il est préférable d'aller sur le site consacré au
photographe :
http://www.ugomulas.org/index.cgi?action=view&idramo=1107773031&lang=ita
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