Ces films ne relèvent pas d'un genre particulier (documentaire, fiction, expérimental…)
Je vous propose deux façons d'y accéder :
- Une liste chronologique classique, avec regroupements par types de production.
- Une série de parcours_montages selon des thématiques issues d'une certaine praxis (cf. l'ensemble du site)
Chronologie des films
I. TRAVAUX PERSONNELS et DE RECHERCHE
II. COLLECTION « OUVRIR LE CINEMA »
III. COMMANDES EXTÉRIEURES
- champcontrechamp [Ouvrir !]
- françois moulignat, work in progress [Ouvrir !]
- joël barguil, mosaïques [Ouvrir !]
- Acte d'absence [Ouvrir !]
- L'automobile mode d'emploi [Ouvrir !]
- La jeune spectatrice [Ouvrir !]
- Au cinéma parlant ou les enfants du Havre [Ouvrir !]
- Lamour est un scénario [Ouvrir !]
- Où sont-elles ? [Ouvrir !]
- Évian : une entreprise ? [Ouvrir !]
- Linformatique en liberté [Ouvrir !]
- L'intégration des familles dans l'unité d'hématologie pédiatrique du Pr. Schaison (Hôpital St Louis) [Ouvrir !]
- Le
patronat réel [Ouvrir !]
- Pellicules cherchent ordinateur [Ouvrir !]
Parcours_Montages
- La rencontre
été tardif, 2012 [Ouvrez !]
L'instant fatal, 1985 [Ouvrez !]
- « Laisser apparaître »
L'instant fatal, 1985 [Ouvrez !]
Voir ce que tu ne verras jamais, 2003, [Ouvrez !]
Nymphe de la République, 2010 [Ouvrez !]
Changer de vie : repérages, 1998 [Ouvrez !]
Soir matin, 2006 [Ouvrez !]
Controtempo, 2001 [Ouvrez !]
Contatti, 2002 [Ouvrez !]
La pesca dell'Elisa, 2008 [Ouvrez !]
- Le mouvement, la décision (du geste cinématographique) :
En silence, 2016 [Ouvrez !]
« Mi!… Vi!… Ci!…», 2010 [Ouvrez !]
Nymphe de la république, 2010 [Ouvrez !]
Controtempo, 2001 [Ouvrez !]
À fleur de Jazz, 2011 [Ouvrez !]
Contatti, 2002 [Ouvrez !]
Soir matin, 2006 [Ouvrez !]
Changer de vie : repérages, 1998 [Ouvrez !]
- Corps au travail
Pellicules cherchent ordinateur, 1983 [Ouvrez !]
Appunti per una Valtiberiana [séquence Domitilla], 2007 [Ouvrez !]
À fleur de Jazz, 2009 [Ouvrez !]
- Filmer un corps parlant
Entre les deux, mon corps balance, [séquence : Marylin] 1986 [Ouvrez !]
La Chinoise 98, 1998 [Ouvrez !]
Au cinéma parlant ou les enfants du Havre, 1993 [Ouvrez !]
Au bord de la mémoire (1) (2), 2004, 2012[Ouvrez !]
Portrait de groupe avec Straub, 2009 [Ouvrez !]
Changer de vie : repérages, 1998 [Ouvrez !]
- Cadrer un corps
Intimités, 1984 [Ouvrez !]
Pellicules cherchent ordinateur, 1983 [Ouvrez !]
L'instant fatal, 1985 [Ouvrez !]
- Filmer avec le corps
Au bord de la mémoire (2), 2012 [Ouvrez !]
À fleur de Jazz, 2009 [Ouvrez !]
Intimités, 1984 [Ouvrez !]
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LE COIN D'ANNICK BOULEAU : FILMOGRAPHIE
observer, deviner, pratiquer
Depuis cette page vous avez accès à la fois, à de la matière "film" (audio-visuelle), à de la matière "écriture".
Mon souci est que cette dernière ne soit pas considérée selon un registre de type commentaire ou analyse de la première.
Si les films sont datés, finis, les blocs d'écriture sont modifiables à tout moment. Certains semblent proliférer plus que d'autres.
Il s'agirait d'élaborer d'autres relations entre audio-visuel et écriture. Vers d'autres formations de savoir.
Je ne sais pas ce que je cherche, donc je ne peux pas le trouver, par définition. Par contre, je vais chercher des "obstacles" engendrant (on le souhaite !) des forces contribuant (on le souhaite !) à la possibilité de produire ces formations.
On est sûr de rien. Il s'agit de poser des hypothèses, de faire usage de l'abduction. Et tenter de renouveler sa "boîte à outils" personnelle.
Le plaisir de pensée. Le plaisir d'avoir (recevoir, accueillir) une pensée.
« … c'est que pour moi le cinéma était fait pour penser et de ce point de vue-là c'est un échec. Je ne vais pas en faire une victoire. Depuis le début, on ne s'en est pas servi, ou presque jamais, pour penser mais pour sentir, ressentir. »
Jean-Luc Godard à Olivier Séguret, in Godard vif, G3J Éditeur, 2015, p. 67.
… Mais il ne s'agira pas de rabâcher, rachâcher, ruminer JLG (+ StraubHuillet + Akerman + Van Der Keuken…)
Le premier obstacle mis en évidence est un passage extrait du Foucault de Gilles Deleuze.
« Les visibilités ne se définissent pas par la vue, mais sont des complexes multi-sensoriels, qui viennent à la lumière. Comme dit Magritte dans une lettre à Foucault, ce qui voit et peut être décrit visiblement, c’est la pensée. Faut-il alors rapprocher cette lumière première chez Foucault de la Lichtung de Heidegger, de Merleau-Ponty, le libre ou l’ouvert, qui ne s’adresse à la vue que secondairement ? À deux différences près : c’est que l’être-lumière selon Foucault est inséparable de tel ou tel mode, et, pour être a-priori, n’en est pas moins historique et épistémologique plutôt que phénoménologique ; d’autre part, il n’est pas ouvert à la parole aussi bien qu’à la vue, puisque la parole en tant qu’énoncé trouve une tout autre condition d’ouverture dans l’être-langage et ses modes historiques. Ce qu’on peut conclure, c’est que chaque formation historique voit et fait voir tout ce qu’elle peut, en fonction de ses conditions de visibilité, comme elle dit tout ce qu’elle peut, en fonction de ses conditions d’énoncé. Jamais il n’y a de secret, bien que rien ne soit immédiatement visible, ni directement lisible. Et, de part et d’autre, les conditions ne se réunissent pas dans l’intériorité d’une conscience ou d’un sujet, pas plus qu’elles ne composent un Même : ce sont deux formes d’extériorités dans lesquelles se dispersent, se disséminent ici les énoncés, là les visibilités. Le langage « contient » les mots, les phrases et les propositions, mais ne contient pas les énoncés qui se disséminent suivant des distances irréductibles. Les énoncés se dispersent d’après leur seuil, d’après leur famille. De même pour la lumière qui contient les objets mais non les visibilités. »
Gilles Deleuze, Foucault, Minuit, 1986/2004, p. 66-67.
Forger ses propres outils
« … mais il n’est pas souhaitable que vous ayez la même lecture que moi, sûrement pas. Moi, ce que je vous propose, c’est pour aider la vôtre. C’est-à-dire la seule chose que je vous demande c’est de bien vouloir considérer ce que je vous propose, mais pas du tout de me donner raison. Il faut au contraire que vous construisiez, que vous fassiez votre lecture propre, votre lecture à vous. »
Gilles Deleuze, le 5 novembre 1985, troisième cours « Sur Foucault, les formations historiques », disponible sur le Webdeleuze.
Questions de méthode
I
« Je voudrais faire de la philosophie à la manière des vaches. De la rumination. Mais des exercices de rumination, ce n'est pas du yoga. Il n'y a qu’un auteur qui a su faire de la rumination, et il était grand parmi les grands, c'est Nietzsche. C'est pour ça que Nietzsche avait comme animal sacré la vache. Il disait que les vaches étaient les vaches du ciel, or la rumination, pour lui ça consistait à lancer un aphorisme et à le lire deux fois. Moi ce n'est pas au niveau d'aphorisme, parce que ce n'est pas mon truc l'aphorisme, c'est la nécessité de ruminer quelque chose. »
II
« Et l'année dernière je suis tombé sur un truc auquel moi je ne croyais pas. J'ai parlé beaucoup de cinéma, mais ce que j'avais dans la tête ce n'était pas le cinéma, pourtant j'en ai beaucoup parlé. Ce que j'avais dans la tête c'était une classification des signes, tous les signes du monde. Et plus j'avançais, plus je me disais- vous supprimez tout ce qu'il y a d'orgueilleux dans ce que je dis, c'est pour aller plus vite-, plus j'avançais et plus j'avais l'impression de tenir quelque chose. Et comme j'étais en même temps préoccupé par le cinéma, que je découvrais, j'allais trop vite, je lâchais des trucs, je ne développais pas, il y avait des trucs que je laissais tomber. Tout ça. Et finalement ç'était ça qui m'intéressait, moi ! Ceux qui était là ce qui les intéressait c'était peut-être ce que j'avais à dire sur le cinéma. À la fin de l'année dernière j'avais l'impression d'avoir frôlé quelque chose d'important pour moi, et d'être un peu passé à côté. Et pourtant je me dis, toujours me parlant à moi-même, que si j'y arrive, à cette classification des signes, évidemment ça ne va pas changer le monde, mais ça va me changer moi, ça me fera tellement de plaisir. C'est ça ce que je veux.
III
« … quand quelqu'un parle l'auditeur peut très bien croire que ça va de soi. Très bizarrement, dans mon expérience, mais inversement aussi, quand vous croyez que quelque chose va de soi, pour moi, au contraire, ça fait problème, il y a quelque chose que j'essaie de cacher, qui n'est pas au point du tout. Et inversement, quand vous vous avez le sentiment que ça ne va pas de soi, que là, il y a quelque chose où je passe trop vite, pour moi c'est que ça va tellement de soi et que c'est tellement facile, alors c'est par là qu'un dialogue peut s'engager qui n'est pas sur le mode classique. C'est que c'est ni vous ni moi qui avons raison, vous comprenez ? Ce n'est pas moi qui ai raison quand je dis : ceci pour moi va de soi, et ceci ne va pas de soi ! Et pour vous c'est l'inverse. Mais ça veut dire quelque chose de très important, ça. De toutes manières des gens ne peuvent s'écouter, les uns ne peuvent écouter quelqu'un, c'est là la seule égalité de celui qui parle et de ceux qui écoutent, les gens ne peuvent s'écouter les uns les autres, que s'ils ont un minimum d'entente implicite, c'est à dire une manière commune de poser les problèmes.
Si on ne pose pas les problèmes de la même manière, ce n'est pas la peine de s'écouter, c'est comme si l'un parlait chinois et l'autre anglais, sans savoir les langues. C'est pour ça que je n'ai jamais considéré qu'un étudiant avait tort s'il ne venait pas m'écouter. On ne peut venir m'écouter que si on a, par soi-même, par un mystère qui est l'affinité, une certaine manière commune de poser les problèmes. Il se peut très bien qu'au bout de deux fois vous vous disiez : mais de quoi il nous parle ce type là ? Si vous avez ce sentiment, ça ne veut rien dire ni contre moi ni contre vous. Ca veut dire, pour employer un mot compliqué, que vos problématiques à vous ne passent pas par les miennes. Quand on dit que les philosophes ne sont jamais d'accord, ç'est une chose qui m'a toujours frappé parce que je crois que la philosophie, beaucoup plus que les sciences, est une discipline de la cohérence absolue. Quand on dit que deux philosophes ne sont pas d'accord, ce n'est jamais parce qu'ils donnent deux réponses différentes à une même question, c'est parce qu'ils ne posent pas le même problème. Seulement comme on ne peut jamais dire le problème qu'on pose, je ne peux pas à la fois résoudre quelque chose, et dire le problème que je suis en train de résoudre. C'est deux activités différentes. Donc le problème c'est toujours l'implicite. J'aurais beau dire, en gros, voilà quel est le problème, il faudra toujours que vous sentiez quelque chose au-delà, et ce sentir quelque chose au-delà c'est ça qui fait que des gens s'entendent ou ne s'entendent pas. Donc si on n'a pas une manière un peu commune de poser les problèmes, alors rien. »
Gilles Deleuze, le 2 novembre 1983, premier cours sur « Vérité et temps, le fausssaire », disponible sur le Webdeleuze.
...
Peut-on commencer à « écouter » Foucault ?
Michel Foucault, Histoire de la vérité. Cours à l’université d’État de New York à Buffalo, mars et avril 1972, Vrin, 2025.
1
« D’abord, donc, quelques petits points de méthode générale. » (p. 213)
3
« Ce que j’essaie d’entreprendre, c’est une histoire que j’appellerais histoire des discours de vérité, et par histoire des discours de vérité, voici ce que je veux dire : ce serait une histoire de la manière dont tour à tour des domaines d’êtres, de choses, de comportements, de conduites ont pu devenir dans notre civilisation objet de formulations qui prétendaient être vraies. C’est également l’histoire de la manière dont le sujet qui parle, le sujet qui énonce, le sujet qui prononce des formules, des propositions, se qualifie et se situe comme formulant la vérité. C’est enfin une histoire de la manière dont des pratiques qui peuvent être dans leur origine, dans leur fonction première, religieuses, magiques, techniques, politiques, etc., de la manière dont ces pratiques se définissent à partir d’un certain moment et dans certaines conditions comme fondées en vérité ou comme permettant de formuler la vérité. C’est en gros cela, cette histoire des discours de vérité, que je veux faire. Et si je me situe à ce niveau, au niveau donc des discours de vérité et non pas au niveau des critères de vérités ni au niveau des contenus de vérité, c’est que je pense que c’est à ce niveau-là qu’on peut arriver à établir le rapport entre, disons, la vérité et puis les rapports de production, les formes de production, la lutte de classes, ou encore des déterminations politiques et économiques. » (p. 214)
2
« En principe, ce cours était intitulé « Histoire de la vérité ». Vous avez pu voir que ce que j’entendais par histoire de la vérité, ce n’était en aucune [façon] l’histoire des connaissances vraies, ce n’était en aucune [façon] l’histoire de la manière dont les contenus de connaissance se sont accumulés les uns sur les autres ou se sont éliminés les uns les autres pour arriver à un certain corpus de connaissances qui serait celui que nous connaissons. Ce n’est pas du tout ça que j’ai voulu faire, et en ce sens ce n’est pas une histoire, donc, des connaissances ou une histoire des sciences. Je n’ai pas voulu non plus, et je ne veux toujours pas faire une histoire des critères de vérité ou une histoire des formes selon lesquelles on a pu déterminer ce qui était vrai ou pas. Ce n’est pas une histoire du rationalisme ou une histoire des formes de rationalités que j’ai voulu faire. » (p. 213-214)
5
« L’histoire que je voudrais faire comme histoire des discours de vérité n’implique pas, ne suppose pas déjà constituée l’opposition vrai/faux, puisqu’il s’agirait de montrer comment l’opposition vrai/faux est née, s’est formée, s’est constituée, et ne présuppose pas non plus l’histoire d’un sujet de connaissance, puisqu’au contraire il s’agirait de montrer comment s’est constitué à travers l’histoire quelque chose comme un sujet à la fois individuel et universel de connaissance. Alors c’est cette région à l’ intérieur de laquelle apparaît l’ opposition vrai/faux, cette région à l’intérieur de laquelle se spécifie, se qualifie le sujet de connaissance, c’est cela que j’appelle le savoir et c’est cette région que je voudrais analyser dans ses rapports avec les systèmes de production, les systèmes d’exploitation, la lutte des classes, etc. Et il m’a semblé que l’analyse de ces rapports du savoir avec les conditions de production impliquait que l’on fasse entrer dans l’analyse, au même titre et sur le même plan que les rapports de production, les rapports de pouvoir. Si bien que c’est cet ensemble rapports de production, rapports de pouvoir et savoir à l’intérieur duquel se spécifient à la fois l’opposition vrai/faux et le sujet de connaissance, c’est cela en somme que je voudrais étudier, c’est cette région que j’appelle la région du savoir-pouvoir. Et cette région du savoir-pouvoir qui se dégage à partir de l’analyse, de l’histoire des discours de vérité, c’est cette région qui, je crois, dans mon point de vue, doit se substituer aussi bien à l’étude des idéologies qu’à l’étude des Weltanschaung, des intuitions du monde. » (p. 216-217)
4
« Il me semble en effet que la tradition dans l’histoire, disons marxiste, de la connaissance ou des sciences a préféré justement les voies que je néglige systématiquement. Vous avez toute une école marxiste qui essaie de rattacher l’histoire des connaissances à la lutte de classes ou à l’opposition bourgeoisie/prolétariat, qui essaie de rattacher l’histoire des connaissances aux rapports de production, en posant le problème en termes de contenu, c’est-à-dire : comment est-ce qu’il a pu se faire qu’à un moment donné la bourgeoisie, par exemple, a pu découvrir tel ou tel contenu de vérité ? Ou encore cette même école marxiste pose la question : comment peut-il se faire que le prolétariat puisse à partir d’un certain moment et dans certaines conditions découvrir par exemple la vérité, les contenus de vérité concernant les rapports d’exploitation, par exemple ? Comment, encore, la bourgeoisie a-t-elle pu découvrir la physique, comment est-ce que c’est le prolétariat qui sait l’économie politique, qui a découvert l’économie politique dans ses contenus de vérité ? Il me semble que cette forme-là d’analyse ait nécessairement à mener, à utiliser une notion qui est pour elle centrale, qui est pour elle indispensable, mais qui est une notion je crois dangereuse à manipuler et fort mal élaborée ; cette notion, c’est celle d’idéologie. Dans cette perspective-là, en effet, pour expliquer comment, à partir d’un certain rapport de production ou à partir d’un certain rapport d’exploitation, on a pu arriver à un contenu de vérité, on est obligé de se référer à quelque chose qui serait l’idéologie d’une classe. Or, dès que vous employez le mot idéologie ou, du moins, dès que vous manipulez la notion marxiste d’idéologie, vous impliquez déjà, vous supposez déjà des rapports de vérité et d’erreur, parce que l’idéologie se définit toujours soit comme illusion, soit comme déformation, soit comme système de représentation qui permet d’accéder à une vérité ou qui empêche d’accéder à une vérité, système de représentation qui induit l’erreur ou qui au contraire permet de l’éviter. De toute façon, vous ne pouvez pas vous servir de la notion d’idéologie sans supposer déjà par-devers vous l’opposition vérité/erreur. Donc vous ne pouvez pas faire l’histoire de la vérité et de l’erreur en utilisant la notion d’idéologie, puisque vous y mettez déjà l’opposition vrai/faux et la connaissance de ce qui est vrai et de ce qui est faux.
L’autre tradition marxiste consiste justement à essayer de faire l’analyse, l’histoire des critères de vérité, en les mettant en rapport avec les rapports de production, formes de production, lutte de classes, etc. C’est-à-dire [que] c’est l’analyse de la constitution du rationalisme à partir de la lutte de classes. Et là, vous êtes obligés de faire appel, non plus à la notion d’idéologie, mais à une autre notion qui a été utilisée précisément par toute une école marxiste comme Lukàcs, Goldmann, etc. : cette notion à laquelle on est obligé de faire appel, c’est la notion de vision du monde, de Weltanschaung. Cette notion de Weltanschaung, qui sert d’intermédiaire entre les rapports de production, les rapports d’exploitation, la lutte de classes, et puis les critères de vérité ou l’histoire même de la rationalité, implique au fond, elle présuppose la notion d’un sujet de connaissance, d’un sujet qui est là, qui est en face du monde, qui jette sur le monde un certain regard qui distribue selon une certaine loi les choses du monde et qui donne au monde un certain profil ; de telle manière que vous ne pouvez pas faire l’histoire du sujet de connaissance en termes de vision du monde puisque, quand vous utilisez la notion de vision du monde, vous impliquez déjà la notion de sujet. De sorte que la notion d’idéologie, qui caractérise la première forme d’analyse marxiste dont je parlais, suppose déjà la maîtrise du partage vrai/faux. La deuxième notion, la deuxième analyse marxiste , l’analyse, l’histoire des critères de vérités suppose la notion de [vision du monde] et par conséquent suppose la notion de sujet. Et vous ne pouvez pas faire l’histoire du sujet de connaissance dans ces termes-là. Donc, vous voyez, dans un cas comme dans l’autre, vous avez un résidu, vous avez un présupposé, soit le présupposé [de] l’opposition vrai/faux, le présupposé de l’opposition entre ce qui est vrai et ce qui est faux, [soit] la présupposition d’un sujet de connaissance. » (p. 214-216)
4bis
« Alors moi, ce que je voudrais faire, c’est précisément une histoire un peu plus radicale que cela, sans être évidemment totalement radicale parce qu’il ne peut pas y en avoir. Et mon histoire, après tout, présuppose bien… — elle présuppose même un tas de choses sur lesquelles vous m’interrogerez à coup sûr. » (p. 216)
(Débuté le 2 octobre 2025. Dernière modification le 11 décembre 2025)
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